Les chiffres montrent que 13 % des femmes et 8 % des hommes seraient concernés aujourd’hui par le workaholisme. Ces données ont évidemment évolué depuis la crise sanitaire. En effet, le télétravail a accéléré la dépendance au travail pour certains. En cause notamment, la solitude qui peut générer un stress favorisant la consommation de substances addictives ou de comportements addictifs. De plus, il peut y avoir la perte de repères spatio-temporels avec une difficulté à scinder la vie professionnelle de la vie privée en travaillant de chez soi. Le télétravail peut générer une incapacité à décrocher du travail menant au workaholisme, mais pouvant aussi favoriser la consommation excessive de substances addictives pour pouvoir se relaxer. Le télétravail peut donc constituer un accélérateur ou rendre difficile le processus pour sortir d’une addiction, mais ne doit pas être vu comme la cause d’une addiction.

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Qu’est-ce que le workaholisme ?

Le workaholisme est une addiction comportementale. Ce terme a été créé par Waynes Oates, psychologue américain en 1968. Ce néologisme provient des mots work (travail) et alcoholism (alcoolisme). Il compare ainsi le rapport pathologique entre une personne et son travail à toutes formes d’addictions et de dépendances.

Une personne workaholique, se réfère aux personnes dont le besoin de travailler est devenu si fort qu’il pourrait constituer un danger pour leur santé, pour leur bien être personnel et pour les relations interpersonnelles (Oates, 1968). D’après les premiers travaux, les salariés workaholiques travailleraient plus de 50h/semaine.

Le caractère pathologique de cette addiction se situe là où l’individu ressent une pression interne l’obligeant à travailler. Les auteurs, Spence et Robbins, ont créé un modèle s’appelant la triade du workaholisme regroupant 3 critères :

  • L’implication dans le travail
  • La contrainte de travailler
  • La satisfaction du travail

Les critères que le workaholique a souvent sont les contraintes et implication au travail élevés, mais avec une faible satisfaction au travail.

Les facteurs de risque

L’addiction au travail peut provenir de différents facteurs et être combinée de plusieurs :

Facteurs environnementaux : le climat organisationnel peut favoriser le workaholisme

  • Augmentation de la charge de travail, pression au travail qui augmente les contraintes
  • Hyperconnexion : avancés technologiques d’information et de communication pouvant aussi augmenter les contraintes

Facteurs individuels :

  • Des personnes avec des traits de personnalité spécifiques pourraient être plus sujet au workaholisme comme l’impulsivité et l’extraversion
  • L’hyperactivité, l’impatience, l’énervement facile, l’hyper investissement professionnel sont aussi des facteurs individuels à risque

Ces facteurs de personnalités auraient aussi un lien avec les composantes de la triade du workaholisme (contraintes, implication, satisfaction).

Les conséquences du workaholisme

Le workaholisme est la conséquence de plusieurs facteurs de risques, provoquant des conséquences :

 1. Sur la santé :

  • Burn out : épuisement physique, émotionnel et mental qui résulte d’un investissement prolongé dans des situations de travail exigeantes sur le plan émotionnel

  • Anxiété, insomnie, TMS, dépression

  • Phénomène appelé Karoshi au Japon (1980) où de nombreux décès ont été signalés par surcharge de travail : « la mort par dépassement du travail » subit par des employés par arrêt cardiaque, AVC ou suicide à la suite d’une surcharge de travail, un surmenage ou d’un stress associé trop important. Il est survenu chez les salariés travaillant plus de 60h par semaine ou plus de 50h supplémentaire par mois.

  • Consommation de substances psychoactives : tabac, alcool, cannabis, médicaments psychotropes, cocaïne…

2. Sur la famille

  • Perte d’équilibre entre vie professionnelle et vie personnelle

  • Négligence de la vie privée familiale, amicale ou loisirs au profit du travail

3. Sur le milieu professionnel

  • Certaines études montrent que le travail excessif et compulsif n’est pas bénéfique en termes de productivité

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Prise en charge du Workaholique

Afin d’évaluer le risque d’addiction au travail, il existe trois types de questionnaire :

  • La WART (Work addiction risk test) : il comporte 25 questions qui évaluent 5 dimensions : les tendances compulsives survenant au travail, le contrôle que la personne peut avoir, le manque de communication, l’incapacité de délégation et l’amour propre. Ce test est celui le plus utilisé avec une bonne validité psychométrique et évalue des dimensions larges.

  • Le WorkBAT (Workaholism battery) : il contient aussi 25 questions qui caractérisent 3 dimensions : l’implication dans le travail, la contrainte dans le travail et la satisfaction au travail.

  • Le DUWAS (Dutch work addiction scale) : il est dérivé des 2 premiers et explore uniquement 2 dimensions : le travail excessif et le travail compulsif.

Concernant la prise en charge, elle se fait souvent assez tardivement suite au déni de la personne souffrant. Néanmoins, elle se doit d’être pluridisciplinaire afin de prendre en charge les troubles somatiques, psychiques et la prévention de rechutes. L’approche psychologique de type cognitivo-comportemental est le principal traitement de cette pathologie. Il peut aussi exister des thérapies de groupe afin de libérer la parole sur leurs souffrances communes. Néanmoins, il existe une difficulté de prise en charge et tardive parce que cette problématique peut encore être méconnue voire valorisée dans certaines entreprises (culture d’entreprise…).

Comment prévenir cette addiction sur le lieu de travail ?

Plusieurs moyens existent afin de sensibiliser les salariés sur l’addiction au travail encore peu connu en France :

  • Politique de prévention interne: prévenir sur les conduites addictives de manière en générale mais aussi sur les addictions comportementales dont le workaholisme. Cette addiction est encore peu connue avec des facteurs de risques et conséquences que nous n’imaginons pas reliés. Il est important d’effectuer de la prévention des risques psychosociaux afin de préserver la santé mentale des collaborateurs

  • Sensibilisation des salariés : discussion en groupe autour des différentes pratiques addictives de manière ludiques et interactives. Cet exercice permet de casser les idées reçues et de se poser des questions sur les pratiques qui nous entourent et de découvrir des addictions qu’on n’imaginait pas

  • Formation managériale: les formations managériales concernant la mise en place d’une politique de prévention aux conduites addictives mais aussi la sensibilisation sur les risques liés à ses pratiques. L’objectif est aussi de pouvoir agir plus rapidement et facilement lorsqu’on repère des signes d’alerte chez un collègue.

  • Communication: sur un sujet aussi peu connu et pas imaginé comme étant une addiction, il est possible de communiquer dessus en entreprise sous forme d’affiche,  lors de différents points d’échanges ou lors de journées sécurité.

Si une personne au sein de votre entreprise ou de votre entourage souffre d’une addiction au travail, plusieurs acteurs peuvent venir l’accompagner :

  • Médecin du travail : rôle majeur pour mettre en place des actions concernant les risques psychosociaux

  • Psychologue du travail : peut mener des actions individuelles ou collectives de prévention afin d’agir sur l’organisation du travail

  • Médecin généraliste : orientation vers d’autres professionnels du corps médical et connaissances des antécédents médicaux

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A propos de l'auteur :

Amélie STAHL est consultante pour le cabinet GAE Conseil et psychologue du travail. Elle est titulaire d’un Master en psychologie social, du travail et des organisations. Au cours de ses premières expériences, elle développe des compétences lui permettant d’animer des groupes de travail, des formations et des sensibilisations auprès de collectifs et d’organisations.