L’employeur a une obligation de santé et de sécurité pour l’ensemble de ses salariés. Cette obligation concerne notamment la consommation de substances psychoactives. L’employeur se doit d’agir quand un agent ou salarié présente un comportement inadapté à la tenue d’un poste de travail que ce comportement soit en lien ou non avec une consommation de substances psychoactives. Il se doit également d’agir quand un salarié se retrouve dans une problématique chronique avec un produit, c’est-à-dire dans une situation de dépendance qui l’empêche d’arrêter de consommer. Toutefois, la ligne managériale se retrouve souvent démunis sur la façon d’agir face à un salarié addict.

comment accompagner un salarié addict

Gestion de l’état chronique : les signaux faibles

A l’instar d’un trouble du comportement relative à la consommation d’une substance psychoactive qui peut entrainer de forts signes d’intoxication sur le plan du comportement comme des troubles de l’élocution, de l’équilibre, une désinhibition ou une somnolence, une consommation chronique d’un produit ne permet pas forcément d’identifier des signes apparents d’emprise. Il devient donc plus complexe de repérer une problématique addictive chez un salarié. Toutefois, il existe, ce qu’on appelle, des signaux faibles.

Ces signaux seront davantage axés autour de la performance au travail à savoir une multiplication des erreurs, des malfaçons, une baisse de la motivation au travail, un absentéisme fréquent, des retards récurrents, des départs prématurés du travail, une diminution des relations entre collègues, … Tous ces signaux peuvent apporter une indication sur une problématique qui peut être liée à une consommation chronique de produit psychoactif mais pas que…

Je repère une situation à risques : comment intervenir ?

Dès lors que l’on a connaissance d’une problématique en lien avec la consommation d’alcool et/ou de produits stupéfiants, il est important d’agir. Ne pas en parler va aggraver la situation du salarié. En entreprise, le salarié addict est la personne dont tout le monde parle mais à qui personne ne parle plus et cela pose de nombreux problèmes : c’est le déni du collectif de travail.

Souvent, en entreprise, les collègues de travail déclarent ne pas se sentir légitimes pour parler de ces problématiques avec leur collègue, que cette personne ne veut pas forcément d’aide, …  Tout ceci est souvent faux à bien des égards. Il s’agit d’une réaction bien classique car on se sent démunis face à ces situations qui nécessitent tout autant du courage managérial qu’une montée en compétence sur le sujet via une formation spécialisée.

Dans un premier temps, il est important de rappeler que tout le monde est légitime pour exprimer son inquiétude face au changement de comportement d’un de ses collègues. La consommation du produit peut être de l’ordre privé mais quand le comportement est préoccupant sur le lieu de travail, tout le monde est en droit de questionner ce comportement. Cela correspond à la culture de la vigilance partagée au sein d’une entreprise.

De plus, une personne en difficulté avec les produits doit faire face à un déni important. Le déni n’est pas de la mauvaise foi. Il s’agit d’un mécanisme de défense permettant à la personne dépendante de se protéger d’une réalité trop difficile à accepter à un moment donné. Ne rien dire alimente le déni individuel de façon importante.

Les remarques et témoignages de l’entourage, milieu professionnel compris permet de soulever le déni petit à petit. Exprimer son inquiétude en restant factuel sur les signes d’alerte et sans aborder la question des produits frontalement peut faire germer l’idée du problème chez le salarié addict. En ne disant rien, nous ne donnons pas l’occasion à la personne de prendre conscience de la problématique, de lever le déni et enfin d’amorcer le processus de changement.

Exprimer son inquiétude permet d’aborder factuellement les difficultés repérées mais ne permet pas une prise en charge. Pour cela, il est fondamental de proposer des orientations. Dans un premier temps, le médecin du travail peut être un bon acteur relais afin d’évaluer la capacité du salarié à se maintenir dans son poste ou si le comportement nécessite une adaptation des missions. Le médecin du travail pourra également orienter le salarié vers des services d’addictologie. De nombreuses ressources existent pour accompagner les personnes en difficulté.

Quels sont les risques de ne pas intervenir ?

La ligne managériale a un rôle important à jouer face à un salarié en difficulté et les risques sont nombreux de ne pas intervenir dans cette situation.

Formation de managers : prévenir les addictions

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Le premier est le risque lié à la sécurité de l’agent / du salarié et celle de ses collègues. En effet, une personne en situation de dépendance va présenter une baisse de sa concentration, de sa vigilance, une somnolence, … tout cela entrainant des risques majorés sur un poste de travail notamment dans le cadre d’un poste de sécurité.

Le risque est également de ne pas aider la personne à s’en sortir et donc de la maintenir dans son addiction comme évoqué précédemment. Cela aura un impact négatif sur sa santé physique (risque de développement d’une maladie) et aussi sur sa santé mentale (risque de développer des problématiques professionnelles, familiales, sociales, …).

Une personne en situation de dépendance peut entrainer des difficultés au sein d’un collectif de travail : baisse de la qualité du travail, retards, absences, … ce qui peut amener les autres à faire pour lui. Le collectif peut lui aussi se retrouver épuisé et ne plus protéger au bout de quelque temps, ce qui sera délétère pour le salarié en difficulté.

Enfin, il est important de rappeler que ne rien dire n’est pas protéger, au contraire.

Quel est le rôle des patients expert dans la prise en charge d’un salarié en difficulté ?

Alors que 7 salariés français sur 10 se sentent démunis dans la manière d’aborder le sujet des addictions avec un collègue ou un collaborateur, 75 % des salariés considèrent que l’interaction avec un patient expert se pose comme une bonne solution (sondage Elabe pour GAE Conseil).

Ariane pommery portrait pour article

Patiente experte, GAE Conseil et Centre Hospitalier Bichat.

« Aborder la question de l’addiction s’apprend grâce à une méthodologie et une approche centrée sur les dysfonctionnements observés sur le poste de travail. »

Aider au dialogue, mieux comprendre les difficultés de chacun et décoincer une situation qui souvent perdure et impacte tout le collectif de travail sont les différents objectifs pédagogiques de notre atelier Témoignage avec un patient expert.

GAE Conseil propose un Programme d’Assistance aux Employés axés autour de 3 services :

  • L’accompagnement individuel en face à face : La prise en charge en face à face d’un salarié en situation de dépendance vise deux principaux objectifs : son maintien dans l’emploi et son rétablissement physique, psychique et social. Le salarié pris en charge bénéficie d’un point régulier avec son référent au cabinet tout au long de sa démarche pour la réussite de son programme de rétablissement. Il est accompagné par une équipe pluridisciplinaire : addictologue, patient-expert en addictologie, psychologue. Outre l’accompagnement individuel le salarié participe, dans le cadre de son programme, à des réunions et groupes de parole en milieu hospitalier avec son patient-expert référent ou alors dans une association d’usagers.

  • L’accompagnement individuel à distance : GAE Phone Line®est une plateforme multi-services destinée à favoriser l’accès aux soins des salariés en difficulté́ avec une ou des addiction(s) ainsi qu’à soutenir et conseiller directement l’entourage professionnel et/ou personnel directement impacté par la situation. GAE Phone Line® s’articule autour de différents médias & ressources spécialisées en addictologie : une plateforme en ligne, une ligne d’écoute et de soutien, de la documentation, des témoignages, …

  • L’accompagnement d’un collectif de travail : L‘entourage professionnel est bien souvent démuni et parfois même en situation de souffrance au travail compte-tenu des répercussions engendrées par la présence d’un collègue de travail en situation de dépendance. Ce dernier engendre, souvent, un certain nombre de dysfonctionnements au poste de travail qui vont avoir des répercussions fortes sur le climat social, la cohésion d’équipe, le manager direct etc. Il est donc nécessaire de pouvoir proposer à une équipe directement concernée un accompagnement de groupe pour rétablir la cohésion et la confiance au sein d’une équipe.

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A propos de l'auteur :

Mathilde PERRONO est consultante et formatrice pour le cabinet GAE Conseil. Elle est titulaire d’un Master de direction des politiques et dispositifs de prévention. Depuis, elle est intervenue auprès de publics variés dans le champ de l’addictologie (entreprise, structures d’insertion, justice, jeunesse, milieu festif …). Elle acquiert ainsi une vision globale de la prévention des addictions. Elle se spécialise dans la gestion des addictions dans le monde du travail pour intervenir auprès des différents acteurs autour des enjeux de santé et de sécurité.