La qualité de vie et des conditions de travail est identifiée comme un besoin commun de toutes les structures de travail.

La manière de la conduire, de l’organiser et tout simplement d’en parler reste encore à concrétiser suivant les structures et les moyens que l’on se donne pour l’améliorer et la faire vivre.

En ce qui concerne les conduites addictives leur lien entre la vie privée et la vie professionnelle est indéniable. Les consommations de substances psychoactives comme l’alcool et les médicaments, par leur durée de vie dans l’organisme, peuvent avoir des incidences sur l’activité professionnelle d’un individu et sur le collectif de travail.

Il est donc particulièrement intéressant de voir comment les conduites addictives participent à la QVCT et surtout comment leur prévention est un axe de son amélioration.

prévention des addictions et QVCT

L’Accord national interprofessionnel (ANI) du 9 décembre 2020

En 2020 les partenaires sociaux sont passés à l’appellation QVCT pour faire évoluer les démarches Qualité de Vie au Travail (QVT) et renforcer la prévention en la matière. C’est l’Accord National Interprofessionnel (ANI) relatif à la prévention renforcée et à une offre renouvelée en matière de santé au travail et conditions de travail qui instaure le texte de base.

« Le présent accord propose également une articulation entre les politiques de santé et de sécurité au travail et une démarche plus globale d’amélioration de la qualité de vie au travail dans l’entreprise. »

C’est bien l’amélioration du travail et des conditions dans lesquelles il est réalisé qui doit être au cœur des démarches.

La prévention et les réalités du travail

Quand on décortique le texte de base de l’ANI :

« La logique de la prévention primaire poursuit l’objectif de s’attaquer en amont aux causes profondes de ces risques avant qu’ils ne produisent leurs effets. C’est pourquoi, en matière de prévention en santé au travail, au-delà de l’approche médicale et médicalisée, la prévention doit être centrée sur les réalités du travail pour préserver la santé et lutter contre la désinsertion professionnelle. »

Quand on parle des « réalités du travail » on peut penser à la prise de produits psychoactifs pour tenir, mieux performer, récupérer, mais aussi s’intégrer voire entretenir les liens professionnels. Ces « fonctions professionnelles des usages de psychotropes [1]» ont été mises en avant par le document « Santé et travail : intervenir sur les usages de psychotropes et les addictions des professionnels » réalisé par la Fédération Addiction.

Il s’agit le plus souvent de consommateurs.trices du quotidien : des personnes qui travaillent, prennent potentiellement des risques à court ou moyen terme, et qui, statistiquement, ne sont pas nécessairement des personnes addicts.

Le texte de l’ANI parle aussi de « renforcement d’actions de sensibilisation et de formation à destination des salariés en tenant compte des spécificités des métiers et des risques professionnels auxquels est soumise l’entreprise ».

[1] Lutz, G.  (2017). Les fonctions professionnelles des consommations de substances psychoactives. Dans Crespin, R.,  Lhuilier, D.  et Lutz, G.  (dir.), Se doper pour travailler. ( p. 205 -223 ). Érès.

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Le risque addictif, un risque professionnel comme les autres au sein des entreprises

« La prévention des risques professionnels en santé et sécurité au travail vise de manière spécifique à supprimer ou à réduire les risques d’atteinte à la santé d’origine professionnelle. » (ANI)

Le risque addictif est à la fois une conséquence d’autres risques comme les Risques Psychosociaux (stress, violence au travail et harcèlement) qui peuvent conduire à la prise de médicaments psychotropes ou à d’autres produits psychoactifs (alcool, cannabis, …) : ils sont un moyen d’y faire face et de tenir.

Cela peut être également un risque à part entière : l’alcool en est une parfaite illustration quand il fait partie de la culture d’entreprise : fêter les réussites, afterworks, apéros, … C’est un risque qui peut perdurer même lorsqu’il a été interdit par le règlement intérieur, avec la possibilité pour certaines entreprises de faire des dépistages alcool et/ou stupéfiants.

Le risque médicament peut également être évoqué quand on sait que la prescription d’opioïdes (anti-douleurs) a augmenté d’environ 150% entre 2006 et 2017 (ANSM), que les troubles psychologiques sont devenus la 2ème cause des arrêts maladies en France en 2022 après les maladies ordinaires, et qu’en 2010, 16,7% de la population active consomment des médicaments psychotropes, anxiolytiques et antidépresseurs (Santé Publique France).

Ce risque est renforcé par la frontière très fine entre vie privée et vie professionnelle, du fait de la durée des effets et surtout de la traçabilité de certaines substances dans l’organisme (alcool, cannabis, CBD, médicaments opioïdes), qui peut aller de quelques heures à plusieurs jours.

Que dire des risques liés à l’outil numérique ?

L’hyperconnexion est une réalité de nos sociétés modernes, avec des outils numériques omniprésents dans les foyers comme dans les entreprises. Utilisés pour faciliter la communication, gagner du temps ou comme outils de travail, ces outils font l’objet d’un usage parfois excessif, pouvant entraîner des troubles tels que des troubles de la mémoire, de la fatigue cognitive, des altérations du sommeil ou des troubles musculo-squelettiques.

La réglementation sur le droit la déconnexion a initié la limitation de ces outils numériques en dehors des heures de travail. Ce droit est un ensemble de procédures mises en place par les entreprises, qui permettent aux salariés de ne pas être connectés en permanence, mais il ne résout pas tout. Pour ne citer qu’un exemple, le volume de mails envoyés quotidiennement à tous les niveaux de l’entreprise, et notamment aux dirigeants souvent en copie des actions de leurs équipes, reste considérable.

Il est donc essentiel d’instaurer un dialogue sur l’usage des outils numériques au sein des différents services de l’entreprise, pour prévenir les risques liés à leur utilisation et de définir des pratiques concrètes pour mieux les réguler.

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La QVCT, comme la prévention, est l’affaire de tous et toutes

« La qualité de vie au travail permet de dépasser l’approche par le risque professionnel en posant un regard plus large sur le travail et ces conditions de réalisation ». (ANI)

Quelle que soit la taille de l’entreprise ou de la structure de travail, la QVCT doit être abordée avec les représentants du personnel et leurs corollaires, les CSE et les CSSCT. Dans les TPE/PME le dialogue peut directement se faire entre salarié.e.s, hiérarchie et employeur.se.

Afin d’améliorer durablement la productivité de l’entreprise et la santé de ses salarié.e.s, tant individuellement que collectivement et dans une même temporalité, de nombreux sujets doivent être abordés à tous les niveaux de l’entreprise :

  • L’organisation, le contenu et la réalisation du travail,

  • Les compétences et parcours professionnels,

  • L’égalité au travail,

  • Les projets d’entreprise et management,

  • Le dialogue social et professionnel,

  • La prévention et la santé-sécurité au travail.

Les managers : une fonction à préserver

Garant et responsable en tant que délégataire de pouvoir de la santé et de la sécurité du personnel sous leur autorité, les managers seront les premiers sollicités ou avertis dans le constat de situations liées aux risques addictifs.

Ils vont devoir échanger et co-construire des solutions avec un individu et un collectif, tout en préservant la production, autrement dit, les objectifs qui leurs sont fixés et qu’ils fixent à leurs équipes. Une double pression qui les expose eux aussi à ce risque pour pouvoir tenir et remplir leurs objectifs.

Missions de conseil

GAE a une offre de services qui permet de diagnostiquer, analyser et préconiser une politique de gestion du risque addictif en milieu de travail. Ce qui inclue directement la formation et la sensibilisation des acteurs de cette politique et de tous les acteurs de la prévention et donc de la QVCT.

Quand on parle de QVCT, on parle de santé au travail et tout simplement de santé

La frontière extrêmement poreuse entre vie privée et vie professionnelles implique à fortiori la santé publique, qui se trouve être également un formidable catalyseur des actions de prévention à proposer aux structures de travail.

Santé publique France propose des actions comme :

  • « Le Mois sans tabac » en novembre (« Chaque année, la France paye un lourd tribut au tabagisme, qui reste la première cause de mortalité évitable avec 75 000 décès par an, soit 200 morts par jour » – Plan national de lutte contre le tabac)

  • « Octobre rose » sur le cancer du sein (+ de 8 000 cas de cancers du sein par an sont dus à la consommation d’alcool – MILDECA 01/10/2023).

D’autres initiatives, comme le Mois sans alcool (ou Dry January, « Défi de janvier ») encouragent à faire une pause dans la consommation d’alcool pendant un mois. Cette démarche permet de réfléchir à la place de l’alcool dans sa vie et à ses habitudes de consommation. En France, l’alcool est responsable de 41 000 décès chaque année et contribue à environ 200 pathologies (source : INSERM)

Ceci constitue un ensemble d’actions à décliner en entreprise sous la forme d’actions de prévention ponctuelles et régulières pour sensibiliser les salarié.e.s aux consommations de substances psychoactives et à leurs incidences sur leur santé.

Au-delà de la santé, il est indispensable de parler des conséquences sur le travail. La consommation de ces produits même dans un usage dit simple n’est pas sans risque particulièrement dans un contexte de travail dangereux ou sensible : travail en hauteur, utilisation de machines-outils, manipulation de produits dangereux, conduites d’engins, ….

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Profil Nadège Viriot

A propos de l'auteur :

Nadège VIRIOT a débuté dans la gestion des risques addictifs en 2008 dans un groupe de BTP en devenant relais addiction pour les salarié.es. En 2012, elle rejoint en tant que coordinatrice régionale une association d’entraide, de prévention et d’accompagnement dans le domaine des addictions en milieu de travail. C’est en tant que formatrice et consultante qu’elle intervient maintenant pour GAE Conseil.