Les addictions constituent aujourd’hui un enjeu de santé considérable. En effet, qu’elle soit liée à des substances psychoactives (alcool, cannabis, cocaïne…) ou à des comportements (travail, sexe, écrans…), une addiction entraîne toujours des répercussions significatives sur la vie des personnes concernées ainsi que sur celle de leur entourage.
Dans l’objectif d’attirer l’attention sur les risques des pratiques addictives, les ateliers de sensibilisation sont un moyen privilégié pour faire face aux idées préconçues. Les sensibilisations jouent un rôle majeur dans la prévention des addictions en offrant un lieu d’échange et de partage d’informations afin de changer les regards et les comportements vis-à-vis de ces dernières. Il convient donc que les ateliers soient conçus et animés de façon à introduire des nouvelles connaissances, accompagner la réflexion et repenser les stéréotypes.
Entre bonnes pratiques, approches innovantes et présentation de ressources, comment rendre les ateliers de sensibilisation réellement efficaces ?
Les représentations individuelles et sociales des addictions
Les représentations sociales des addictions sont généralement modelées en fonction d’un certain nombre d’idées reçues. Il n’est pas rare que les addictions soient par exemple associées, à tort, à une faiblesse de caractère, un manque de volonté ou un vice. Ces préjugés alimentent la méconnaissance et l’incompréhension autour de la thématique des addictions, rendant plus difficile l’empathie et la prise en charge des personnes concernées, notamment dans le milieu professionnel.
Ils entravent également la recherche d’aide et de traitement. Un atelier bien conçu peut contribuer à briser ces barrières mentales en remettant en question les stéréotypes négatifs qui entourent la perte de contrôle d’une consommation à risque. Cela permet d’éclairer les questionnements autour de ce sujet et il devient ainsi possible de déstigmatiser les addictions et d’expliquer l’association complexe entre des facteurs biologiques, psychologiques et environnementaux, qui peut provoquer le développement de la maladie chronique addictive, et ses conséquences.
Les représentations sociales et individuelles des addictions sont intégrées en chacun par le biais de l’éducation, de l’expérience vécue et de la culture dans laquelle on évolue. Ainsi, pour sensibiliser les salariés efficacement, il est nécessaire de déconstruire les idées préconçues pour réapprendre et laisser place à de nouvelles perspectives basées sur des informations factuelles, entraînant une meilleure compréhension des problématiques addictives au travail.
La sensibilisation et le concept « recadrage »
La sensibilisation passe alors par une action visant à informer et influencer positivement les perceptions et les attitudes du public concernant les addictions. Dans cette optique, la notion de « recadrage » occupe une place majeure. Selon Paul Watzlawick, psychologue et sociologue américain, « recadrer » se définit par le fait de « changer le point de vue perceptuel, conceptuel et/ou émotionnel à travers lequel une situation donnée est perçue pour la déplacer dans un autre cadre qui s’adapte aussi bien (…) aux « faits » concrets de la situation et qui va en changer toute la signification ».
Dans le contexte de la sensibilisation, le « recadrage » est un outil puissant pour influencer de manière positive le point de vue du public. Il peut par conséquent permettre de créer un cadre cognitif pour influencer la perception des individus et susciter une compréhension plus pertinente ou des réponses plus appropriées.
Pour Françoise Kourilsky, docteure en psychologie, ce « recadrage » passe par trois étapes :
La ludification des contenus pour mieux marquer les esprits ?
Les sciences cognitives nous montrent que les notions transmises au cours d’une formation ou d’une sensibilisation sont davantage maintenues dans notre mémoire à long terme lorsqu’elles sont apprises dans des situations qui suscitent des émotions, positives ou négatives (e.g. Sander, 2013).
De plus, la ludification permet d’engager plus facilement les participants dans l’activité et de ne pas les laisser passifs. Le contenu pédagogique sous forme de jeu présente des sujets sérieux de façon à impacter positivement les idées reçues.
Stanislas Dehaene, neuroscientifique et docteur en psychologie cognitive, décrit l’apprentissage en 4 étapes. Nous pouvons étudier ici ces étapes à travers l’angle du jeu :
Adapter son atelier de prévention
Il est important de savoir s’adapter au public face auquel on se trouve lors d’un atelier de sensibilisation. Les besoins et les attentes en termes de connaissances générales sur les addictions peuvent varier en fonction du contexte culturel ou professionnel de l’entreprise, des activités et tâches quotidiennes du groupe, ou d’autres facteurs comme l’actualité, l’expérience personnelle etc. Au risque de créer une certaine résistance à l’ouverture de la discussion ou à la réception d’informations lors de l’atelier, il est important de ne pas présenter des choses qui sont trop éloignées du public cible.
Pour avoir la confiance et l’attention des participants, il convient donc de commencer par se présenter et expliquer la raison de l’intervention. Toute information ou donnée présentée lors de l’atelier doit être basée sur des preuves scientifiques solides afin d’être crédible. Cela renforce l’impact de l’atelier et assure la bonne réception des informations par le public. Il est également important de mettre à jour régulièrement le contenu pour refléter les dernières avancées dans le domaine de la recherche ou les mises à jour juridiques, en particulier en France, sur les addictions.
En somme, les ateliers de sensibilisation adaptés aux attentes et aux besoins du public et de l’entreprise, peuvent offrir un espace de discussion constructif permettant de redéfinir les stéréotypes et la stigmatisation liées aux addictions, notamment en :
La sensibilisation contribue ainsi à changer les perceptions et à créer une société plus inclusive et bienveillante pour les personnes touchées par les addictions. L’efficacité d’une sensibilisation se mesurera à l’évolution de la culture et des représentations sociales et individuelles des addictions, mais aussi au changement de comportements attendus vis-à-vis de ces dernières.